dimanche 4 janvier 2015

Voyageur, de Pierre Graveline, éditions Fidès

Le titre ne ment pas. Il s'agit bien d'un récit de voyage. La bibliographie de cet auteur issu du monde syndical contenait jusqu'ici des essais sur la société québécoise et son histoire. Je ne le connaissais pas.

Ce récit, tout à fait personnel, raconte un périple d'un jeune de 19 ans. Quittant son Montréal natal pour la première fois de sa vie en direction d'Amsterdam, le voyageur (terme qui constitue, pour l'auteur, une distinction intéressante et pertinente du touriste) se rendra jusqu'en Inde par voie de terre. Fait particulier et non négligeable ce périple aller-retour s'est fait en quelque sept mois pendant les années 1971-1972. Ce contexte historique ajoute beaucoup à un récit écrit somme toute assez sobrement. On ne saurait en effet prêter aucune intention littéraire à un tel bouquin. Si tel en était parfois le cas, ce serait à travers quelques fioritures que le narrateur se permet ici et là avec plus ou moins de succès. En fait, l'intérêt réside ici justement dans la sobriété, voir la presque naïveté avec lesquelles ce voyage est raconté.

Au début, on croit à la découverte de l'Europe et de la vie par un jeune Québécois tout juste sorti, comme son peuple, d'un obscur passé. Mais tel n'est pas le cas, à tout le moins à partir d'Istanbul où commence un périple qui devient un réel récit de voyage. Les descriptions des lieux et un petit côté "wikipédia" tiennent tant de la carte postale que du blogue mais aussi et surtout, ce voyageur nous emmène en des contrées aujourd'hui bien mal connues. Qu'on pense seulement à l'Iran et à l'Afghanistan. Quant au Pakistan et à l'Inde, notons seulement que le Bengladesh voisin est devenu indépendant en 1971. Les tensions étaient alors à leur comble dans cette région, ce qui rend le contexte de certaines pièces du récit encore plus intéressantes.

Ajoutez à ça l'oeil et la débrouillardise d'un jeune de 19-20 ans, son insouciance prétexte à de nouvelles aventures et les clichés issus de souvenirs nostalgiques d'une jeunesse perdue (comme par exemple les passages obligés et pas toujours pertinents de conquêtes féminines...), et vous obtiendrez le récit d'un voyage en des lieux et une époque méconnus trop souvent victimes de clichés. Un tel ouvrage constitue une intéressante et différente vue de l'intérieur qui fait justement abstraction des préjugés qu'un lecteur de 2015 pourrait avoir sur cette région et sur cette époque. Bien sur, quelques révisions éditoriales auraient pu parfois resserrer le texte, mais celui-ci demeure facile à lire et le plus souvent captivant.

Ce récit méritait donc d'être publié. Je le recommande aux amateurs de voyages, ou aux lecteurs en mal de dépaysement dans "l'Histoire vraie".

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