dimanche 2 avril 2023

Cabale, par Michael Delisle, éditions Boréal

L'homme est célibataire et mène une vie qu'il décrit en tous points comme ordinaire. Prof au cégep, il n'est pas plus heureux au travail que dans sa vie. Il a tendance à boire et sa vie sociale se porte au plus mal. L'histoire commence d'ailleurs par la relation ratée avec un collègue de travail qui aurait pu devenir un ami. Habile début.

Puis, surgit son père, rendu vieux. Père et fils ne se sont pas fréquentés depuis des années. Le paternel tentera de renouer avec ses deux fils, notre homme et son frère. Or, le personnage principal ne porte pas son père dans son coeur. Alors ce père, sans trop de scrupules et avide de reconnaissance, trouvera le moyen de gagner la sympathie de son autre garçon.

Aucune relation, dans ce court livre, n'est confortable. Tout est soit difficile, soit lourd, tant dans la vie professionnelle que personnelle du personnage principal, et on voit vite venir la cause de tout ça avec un père prodigue qui est loin de faire figure de héros.

C'est fou de constater combien Cabale est l'antithèse de Mille secrets mille dangers, d'Alain Farah, que j'ai lu juste avant. C'est facile de comparer les deux puisque chacun tourne autour de l'histoire d'un gars qui n'arrive pas à se défaire de l'empreinte de son père. Alors que Farah est dans l'expression pleine et puissante de sa douleur, de son mal être et de ses tares, le personnage de Delisle est dans l'effacement, l'absence de tout bruit, le repli sur soi.

Il faut dire que le style de Delisle est lui aussi toute en retenue. L'écriture est sobre, directe et efficace parce qu'on s'attache au personnage. On essaie de trouver avec lui d'oû pourrait venir une espèce de rédemption, ou de calme, que de toute évidence il n'arrive pas à trouver.

C'est mon premier roman de Michael Delisle. L'impression qui reste est bonne, mais pas forte, ce que je relie à la sobriété de son ton. Bon, faut dire que le sujet n'est pas spécialement ancré dans le positivisme non plus, mais il n'y a rien là de déprimant ou de triste. Juste un sentiment de ratage (celui de la vie du personnage, pas du livre), quelque chose qu'on a l'impression d'avoir déjà vécu et qu'on se plait à ne pas ressentir trop souvent. En tout cas, pas dans sa vie. Dans le livre de Michael Delisle, par contre, le sentiment est habilement rendu, ce qui en fait un livre réussi.