dimanche 18 septembre 2016

Zero K, par Don De Lillo, éditions Scribner

Un homme descend d'un avion. Le vol a été long et comprenait plusieurs escales. Sans trop savoir où, sur la planète, il a atterri, il se retrouve dans un bâtiment ultra-moderne, un complexe vaste, hyper-techno mais sobre et pur où se retrouvent son père, le commanditaire de ce voyage, et sa conjointe mourante. L'endroit accueille des gens en fin de vie, mais dont la vie se terminera pas. On y exploite un processus de cryogénisation censé faire renaître dans de meilleurs jours et sous de meilleures auspices.

Ce père est un homme d'affaire pour qui tout a réussi. L'idée de perdre sa compagne de vie, belle-mère du narrateur, est pour lui impossible, d'où le recours à ce procédé. C'est son fils qui raconte comment lui et son père se sont retrouvé à cet endroit. Il essaie de comprendre. Entre son père et lui, ça n'a jamais été simple, ne serait-ce que par ce qui s'est passé pour sa mère, première femme de son père, qui l'a laissé tomber il y a plusieurs années. A côté de son père, le fils se sent perdu, voire diminué, sans ambition. Son père était immense, il a toujours décidé de ce qui lui arriverait... jusque dans la mort...
C'est le retour du Don De Lillo de White Noize. Il décrit ici, par une métaphore vraiment efficace, le désir de contrôle, le pouvoir inutile de l'argent, la superficialité qu'il entraine. Dans le complexe "mortuaire", se succèdent des personnages franchement fascinants qui, à peu près tous, donnent une impression de malaise vraiment puissante. Parce qu'il est aussi question du rapport de cette société de l'argent avec le religieux, bref, avec tout ce qui représente le contrôle.

L'atmosphère st digne du film Gattaca. Futuriste mais pas trop, on est parachuté dans un monde tellement parfait qu'on en a le vertige et qu'on désire s'en sortir, parce qu'on y étouffe. Le désire de contrôle affronte la liberté, le premier empêche l'autre, et le personnage principal est en plein centre de cette confrontation. C'est le choc des générations, mais aussi celui de deux mondes, le sien et celui de son père. J'y vois aussi une critique brillante de la société américaine actuelle.

Dur, lent, très intérieur, brillant, ce livre de De Lillo saura ravir ses fans, et fera découvrir un grand auteur à ceux qui ne le connaissent pas encore. Zero K n'est pas encore traduit en français.