samedi 14 avril 2012

Hongrie-Hollywood Express, par Éric Plamondon, éditions Le Quartanier


Un livre est un étrange objet. Il vous suit pendant une période de votre vie, intensément. Il vous impose de vous concentrer sur lui en même temps qu'il stimule vos pensées et votre imagination. Ces derniers prétextes font en sorte qu'il est difficile de l'oublier ou de le mettre de côté pour un temps. Il s'impose.

Gérer un livre ressemble souvent à la gestion d'une relation, fut-elle courte. Elle est intense, vous donne beaucoup et demande souvent tout autant. Or certains livres pèsent plus lourd que d'autres pour toutes sortes de raisons, alors que d'autres ne font que passer. On les oublie vite malgré le temps passé avec eux. Alors quoi, est-ce que je lis trop? Est-ce qu'un certain trop plein pourrait faire en sorte que parfois, j'aie raté une bonne rencontre? Possible. Je me sens ainsi avec Hongrie-Hollywood.... Je sens bien que y'avait quelque chose, mais la sauce n'a pas pris.

Bon peut-être que de penser à un autre en étant avec un livre n'aide pas. Ça aussi c'est comme pour les humains... En lisant cette biographie romancée de Johnny Weissmuller, je pensais trop à celles écrites par Jean Echenoz, surtout celle d'Émile Zatopek dans l'excellent Courir. Mais pourtant j'ai tout fait pour passer par-dessus ça. Ne me reste qu'un mot: la déroute.

L'histoire racontée est celle, déroutante, d'un acteur qui fut le plus brillant d'Hollywood pendant un temps puis qui finit complètement déchu. À travers ça, y'a un narrateur qui se raconte au temps présent. C'est déroutant. En fait, la vie de l'ex-Tarzan l'est aussi, déroutante. Ça en fait déjà beaucoup... Or la narrateur, ou l'auteur, enfin le livre exprime une obsession sur un personnage. Une fascination. Ça c'est beau, une fascination, une passion, mais elle ne m'a pas embarquée.

Plamondon écrit très serré. Chaque ligne est juste, chaque chapître est court. Certains font 10 mots. D'autres une ligne. Puis ça repart. Là on a l'acteur avec sa 3e femme à 40 ans. Puis un petit chapître, une comptine. Là on a Weissmuller enfant. Et là le narrateur. Petit chapître. On reprend Tarzan à 30 ans, et ainsi de soute. C'est anecdote après anecdote. C'est déroutant.


J'ai souvent souri. Plusieurs passages sont beaux, des pensées sont jolies. Mais y'a une sauce qui... sans dire qu'elle n'a pas pris... que manque-t-il? Quelque-chose dans le style, on dirait, m'a empêcher de plonger. J'avancerais peut-être que j'aurais aimé aller plus loin, creuser ce dont on me parlait. Ce livre n'est pas superficiel, mais il m'a effleuré plutôt que carrément touché.

Je n'ai pas de raisons de ne pas avoir aimé Hongrie-Hollywood Express. Aucune raison de le déconseiller. Et pour faire en sorte que ça reste ainsi, je n'irai pas plus loin. J'ai bien vu, dans les dernières pages, que ce livre annonçait déjà le suivant, dont j'ai appris la sortie récente. Ah tiens, y'a bien un petit quelque chose là qui m'a dérangé, un genre d'auto-promo, mais bon, est-ce bien le cas? Qu'importe. Je me laisserai raconter son second ouvrage, Mayonnaise, sans me le procurer. Faudra me convaincre, faudra en discuter, je sais pas, mais une chose est sure...

... je suis dérouté.

lundi 9 avril 2012

Arvida, par Samuel Archibald, éditions Le Quartanier


Certains livres, et c'est rare, sont propices à émousser le chauvinisme du lecteur. Les raisons sont généralement géographiques, comme en ce cas. J'avais tout pour m'accaparer l'Arvida de Samuel Archibald puisque sans être le mien, ce fut celui de ma mère et j'ai grandi juste à côté. Or voilà, je le lui laisse. Parce que son Arvida à lui est mille fois plus beau que le mien. Et c'est très bien ainsi.

J'ai hésité longtemps avant de me le procurer. Je craignais un truc folklo-nostalgique racontant les clichés de mon coin de pays, jusqu'à ce que j'aperçoive ce petit mot un peu excentré: "histoires". Son pluriel m'a charmé, l'audace du mot aussi. Les nouvelles ne m'attirent pas spécialement. Mais les histoires, oui. C'est tout à fait le mot qu'il fallait utiliser.

Les critiques de ce recueil qui a connu, à juste titre, beaucoup de succès au Québec parlent de l'auteur comme d'un conteur. Pourtant, il n'est pas question ici de contes. Ni de nouvelles. Ce sont bel et bien des histoires. Une histoire, c'est souvent ce qu'on reproche à quelqu'un de nous raconter, c'est souvent ce dont on qualifie une anecdote particulièrement remarquable. C'est aussi ce que les mamans racontent à leurs enfants avant de s'endormir. Pas que Samuel Archibald, m'ait endormi. Loin de là. Je l'ai juste lu comme on écoute quiconque nous raconter quelque chose.

L'histoire, dans le contexte géographique du titre de ce livre, laisse entendre que ce qui est raconté l'est par quelqu'un d'habile avec les mots et bien souvent avec les gestes. Une histoire, pour autant que je m'en rappelle, ne nous laisse pas indifférent parce qu'elle nous laisse pantois. On se demande si elle peut être vraie, parce que ça se pourrait, et d'un autre côté, il est fort possible qu'elle ait été inventée. Donc, ne raconte ni n'écrit pas une histoire qui veut. C'est un art.

Le prétexte d'Arvida ajoute à l'atmosphère. Dans un coin de la planète sans trop d'histoire, Arvida représente l'élément mal aimé, mais tout aussi fantasque, presque mythique. Arvida n'a pas cent ans mais est déjà prétexte à plusieurs histoires parce que la sienne propre se distingue. Archibald y met en scène des gens du cru, dans ce qu'ils ont de plus actuels, de plus vrais, en mettant en valeur leur côté "personnage". À chaque histoire, un "je" ou un "il" prend la place principale et autour de lui ou d'elle virevoltent d'autres personnages soit aussi forts en gueule que le narrateur, soit suffisamment délurés ou fous pour qu'on leur porte attention. Parce qu'Archibald le sait, une histoire, c'est souvent prétexte à exagération, aux racontards et aux suppositions. Quel beau matériel pour exciter l'imaginaire.


Dans un tel recueil, on préfère toujours certaines portions à d'autres. Pour ma part, une se démarque particulièrement; "Chaque maison double et duelle", ou le narrateur est tellement vrai que je l'entendais parler, je le voyais me regarder en racontant son histoire de maison ou de vie hantée, c'est selon. Cet auteur fait si bien parler ses personnages qu'on les croit même s'ils nous racontent des histoires. C'est là, précisément là, où mon chauvinisme entre en jeu. Arvida et ses environs pullulent de gens comme ça, et la photo rendue par Samuel Archibald en est très claire. J'aime ces histoires, même celles à dormir debout.

Que dire de cette histoire où un groupe de gars pas vraiment fiables essaient de faire passer la frontière canado-américaine à une une pauvre immigrée colombienne. Doù viennent les gars en question? Je vous le donne en mille... Ça ajoute à une histoire pareille, croyez-moi. Et cette entrée dans la vie adulte, toute en beauté, toute en silence, sur les monts bleus et blancs qui surplombent Arvida et sa région.

Je vois là une voix de la trempe d'un Nicolas Dickner. Le style est différent, mais la force et la souplesse sont les mêmes. Arvida charmera tant les Arvidiens que ses visiteurs d'outre-mer. C'est là le genre d'ouvrage qui nous donnerait l'envie de lire d'autres auteurs québécois, mais aussi de relire Samuel Archibald, dont j'espère un roman à venir, que j'imagine déjà excellent.

Encore!

lundi 2 avril 2012

Le blogue d'Éric Boury

Il me faut ajouter ce lien et vous le suggérer fortement. C'est le blogue d'Éric Boury, traducteur de l'islandais vers le français de nombreux ouvrages dont les deux derniers chefs-d'oeuvre de Jon karman Stefansson.

On y découvre entre autre un excellent article sur les devoirs du traducteur mais aussi, et surtout, que ces deux premiers livres de Stefansson sont les deux premiers tiers d'une trilogie et qu'on aura droit à la troisième partie en 2013. J'en crierais de joie!

J'ajoute enfin que le travail d'Éric Boury. Ses traductions sont des oeuvres en soi, des architectures très habilement tendues entre deux langues avec des mots justes, beaux, choisis. Les articles de son blogue en témoignent.