samedi 24 octobre 2009

Piazza d'Italia, par Antonio Tabucchi, Éditions Folio


J'ai toujours eu un penchant pour les livres à images, ceux écrits par des peintres du verbe, des auteurs dont les formulations tiennent des plus fameux coups de pinceaux. Alors imaginez une tisserande de filets de pèche qui "tissait des filets de distraction", de son amoureux "qui la regardait avec adolescence", imaginez un vol de fenètres pour fuir les temps troubles qui s'en viennent, des fenètres qui ne veulent pas voir.

Antonio Tabucchi peint plus encore qu''il écrit. Cet homme perçoit le monde autrement, du fond du coeur. Cette histoire d'une famille à travers trois générations aurait pu s'étendre sur plusieurs centaines de pages, mais non. Tabucchi en a fait un portrait plutôt qu'un récit. Portrait de famille à travers celui de l'Italie naissante de Garibaldi jusqu'après la deuxième guerre, Piazza d'Italia emmène le lecteur à Borgo, petite ville traversée par le temps, par des personnages parfois felliniens, parfois hyper-réalistes, universels dans leur vision des gens et des événements.

L'écriture d'Antonio Tabucchi berce. Je ne saurais en dire quelque mal qui soit. J'oserai une petite comparaison avec Baricco en ce que tous les deux savent mettre en scène l'événement le plus anodin en magnifiant la perception d'un personnage. Qu'une cloche fonde sous l'effet d'un brasier, elle aura fondu de malheur. Qu'un homme attende cinquante années pour que la femme qu'il aime concède à lui accorder sa main: on comprendra. Mettre en scène des images autour des personnages et des décors les plus banals relève du grand art. Tabucchi le fait sans peine. Ses descriptions sont essentielles sans pour autant être interminables.

D'abord paru en 1975, Piazza d'Italia a le bonheur de se retrouver sur les tablettes sous un nouveau format. Belle initiative qui donne l'envie folle de re découvrir l'oeuvre de Tabucchi. J'avais déjà été charmé par "Tristano meurt". Cette fois, je suis accro.