dimanche 30 novembre 2008

Une éducation libertine, par Jean-Baptiste Del Amo, Gallimard


Pour parler de ce livre, il me faut fermer les lumières, tamiser l'atmosphère, allumer une bougie, même. J'en parlerais à l'encre plutôt qu'au clavier, et si j'avais le talent, je l'enluminerais.

Je parle ici d'une exception, d'un livre qui m'a tenu plus que je le portais. Dès les vingt premières pages, je savais que j'étais happé. Je me souhaitais un dénouement heureux parce qu'il en resterait inévitalemment quelque chose. Ce dénouement, je n'en parlerai pas. Je mentionnerai seulement qu'une fleur est encore plus belle lorsqu'elle pousse dans la fange. Mais les fleurs sont fragiles et immortelles. Et dans ce livre, on les sent: fleur et fange.

Ce livre m'a marqué. Certaines scènes sont si fortes qu'il ma fallu souvent refermer le livre un instant pour continuer. D'où sort Jean-Baptiste Del Amo? Le mec a 26 ans et il écrit comme s'il avait vécu un siècle!

J'ai découvert son livre par une entrevue à la radio. Le mec m'avait l'air calme, à des kilomètres de la prétention. Il disait avoir écrit ce livre en écoutant Portishead et Radiohead. Et pourtant, ça se passe en 1760, à Paris. J'ai écouté la même chose en le lisant et vous dire franchement, j'y rêve encore.

"Une éducation libertine" est dur, puissant, c'est un ouragan. C'est la démonstration que pour apprécier le beau, il faut avoir connu la laideur et que pour apprécier sa vie, il faut avoir conscience de sa mort.

Lisez-le, je vous en prie, et reparlez-m'en, juste pour savoir si vous aussi, ça vous a pris autant que moi.

Un livre immense et beau, tellement beau.

Meme le mal se fait bien, par Michel Folco, Stock


"Dieu et nous seuls pouvons", "Un loup est un loup", "En avant comme avant". De livre en livre, progressivement, on s'y attache. Au début, on découvre une curiosité, une écriture crue où l'Histoire avance en même temps que des personnages qu'on dirait inspirés par des bandes dessinées. L'abracadabrant cotoie l'anecdotique, on ne peut s'empêcher de rire et parfois, on détourne les yeux du livre tellement la scène est horrible.
Je me souviens avoir eu peur qu'on adapte les Pibrac et les Tricotin au cinéma tellement l'écriture s'y portait bien. Mais non, heureusement, Folco n'a pas subi les affres que des John Irving, des Stephen King et tant d'autres ont dû subir au petit écran.

J'ai entammé "Même le mal se fait bien" sans en avoir entendu parler. Je l'ai aperçu à ma librairie et paf, c'était certain que je repartais avec ça. Naïf comme tout, je ne savais même pas qu'il s'agissait de la suite des histoires précédentes. C'est vous dire à quel point je me suis laissé embarquer. J'ai vécu entre Turin et Vienne avec Marcello, lu ses histoires incroyables sur le bout de mes bancs de métro et d'autobus, ri à me faire regarder bizarrement. Du très grand roman. Folco fait du bien. À qui apprend le français et serait prêt à entammer une première lecture, je le recommendrais fortement.

Seul reproche dans le style, j'ai pas trop compris pourquoi l'auteur a truffé son texte d'onomatopées. Des "brrrroooom", des "psssshhhht" et autres "bang ding bang" font inévitablement penser, encore une fois, à la bande dessinée. Bizzarerie on ne peut plus Folco. Un peu comme son personnage qui zézaye et tous ses mots d'italien et d'allemand. Avec "Même le mal se fait bien", on a vraiment envie d'apprendre l'italien pour ensuite aller se promener à Turin. Ah tiens, Turin. C'est pas là où se passait aussi le dernier Barrico? Faudra que je passe par là, tiens.

Et vivement le prochain Folco!

samedi 29 novembre 2008

Malavita encore, Tonino Benaquista, Gallimard


Reprise.

J'ai passé près de quatre mois sans lire, entre mars et septembre. Contribution à un été sans soleil, je n'ai pas réussi alors à m'imprimer de mots derrière les yeux. Sorti depuis de ce désert, je me suis replongé progressivement dans le vrai monde des histoires, des romans.

Je me suis d'abord tiré de ma torpeur avec "Malavita encore". Je savais Benaquista capable de me faire sourire et de me captiver avec ses personnages tordus. "Saga", et "Quelqu'un d'autre" n'étaient pas rien. "Malavita" avait aussi laissé un bon souvenir. La famille de mafiosis repentis rendus anonymes sous la protection du FBI méritait effectivement une suite.
Benaquista, c'est le polar romancé, un film avec une image à chaque seconde. "Malavita encore" commence lentement, chronique les quatre membres de la famille, toujours cachés quelque part en France. Ils ont vieilli. Les enfants ont quitté la maison, le père écrit toujours ses romans policiers pitoyables, la mère même ouvertun petit commerce à Paris. Chacun fait sa vie plus ou moins de son côté, plus ou moins libérés de l'emprise de leur mafieux de père, mais comme bon sang ne saurait mentir... tout dérape à partir du milieu du livre. Et c'est parti dans le plus pur Benaquista.

Est-ce l'habitude qui s'installe, ou le genre de l'auteur qui se banalise, est-ce mon état pas complètement réceptif? Reste que bien que diverti, j'ai terminé "Malavita encore" sans ce désir que ça continue que m'avait laissé ses autres titres.
Pour qui veuet découvrir un auteur qui déménage, vivement Benaquista, mais ne surtout pas commencer par "Malavita encore".

Pour fans seulement.