lundi 20 mars 2017

Le garçon, par Marcus Malte, éditions Zulma

Une des premières scènes du livre le verra marcher avec le cadavre de sa mère sur le dos. C'est encore un enfant. Puis il prendra la route où il découvrira la survie. Le presque enfant sauvage fera ensuite la découverte des autres par quelques rencontres formatrices, jusqu'à ce qu'advienne celle qui le définira, le remettra au monde, et l'achèvera, en quelque sorte.

Ce livre est l'histoire d'une vie, celle du garçon, d'un territoire, celui de la France, qu'il parcourra du sud au nord, et aussi, et surtout, d'une époque. Né un peu avant le début du 20e siècle, le garçon traversera une époque qui fascine beaucoup la France depuis quelques années: le début du 20e. Après Règne animal, de Jean-Baptiste Del Amo, dont l'histoire passe par la Grande guerre, mais aussi et surtout Au revoir là-haut, de Pierre Lemaître, qui raconte le pendant et le juste après de l'époque, Le garçon, de Marcus Malte, pivote, lui aussi, autour de ce qu'on pourrait facilement appeler "l'événement destructeur".

La particularité tient ici dans le personnage principal. Ce garçon ne parle pas. Il ne sait pas parler. En fait, on ne lui a pas appris grand chose. Seulement sait-il comment se débrouiller pour survivre. Autrement, il a tout à apprendre de la vie en société et des relations avec les autres. C'est ce qu'on le verra faire au fil de ses rencontres. Produit de la vie à l'état brut, il découvrira tout avec la naïveté d'un enfant et la pureté d'un être on ne peut plus naturel, sans éducation, mais aussi sans influences. Là réside l'originalité de ce livre: la pureté d'un personnage qui traverse une époque tout sauf propre. N'empêche que la vie lui fera souvent des faveurs, surtout au début de sa vie. On aura alors droit à des scènes vraiment jolies, parfois drôles et de plus en plus émotives. De plus en plus. Parce qu'émotions, il y a dans Le garçon. On y passera d'un érotisme frôlant la pornographie aux scènes de guerre avec tripes et boyaux. Sans mauvais goût mais hyper intense, on vivra de vraies montagnes russes d'émotions, des plus belles aux plus sombres.
Intense, c'est le mot. Galvaudé, depuis quelques années, il reste quand même un sens profond à ceet adjectif qui définit totalement ce livre. Certains épisodes de la vie de ce garçon sont vraiment très intenses. Tellement que parfois, on se demande si c'est pas un peu trop. Parce que voilà, en plus de la guerre, il y est aussi question d'amour, et les deux extrêmes vont jusqu'au bout de ce qu'un personnage peut en vivre. C'est in-ten-se, et ma fois, c'est souvent très beau.

Pas un roman d'amour, ni un roman de guerre, Le garçon en est un où on dirait que l'auteur s'est fait plaisir. Tout y est clair et direct. À l'image de son personnage principal, ce roman a le mérite d'être sincère et sans fioritures. Il plaira aux amateurs de grands romans qu'on pourrait qualifier de "classiques", aux passionnés du début du 20e siècle, et à ceux ayant besoin d'un roman sans prises de tête, aux sentiments aussi purs que durs.

Un beau roman français.