mardi 11 janvier 2011

Contre Dieu, par Patrick Sénécal, éditions Coups de Tête


Quand la lecture d'un roman devient un roman elle-même...

Je n'avais rien lu de Sénécal, auteur prolifique dont les romans noirs et les polars ont souvent été adaptés à l'écran par des réalisateurs québécois, souvent avec succès. Sans dénier d'aucune façon l'auteur, je dois seulement préciser que le genre ne me plaît pas. Horreur, romans noirs et affaires sordides ne m'attirent pas. N'en demeure pas moins que je me suis procuré Contre Dieu parce qu'on en parlait comme d'un roman noir, oui, mais peut-être moins sordide, donnant moins dans l'horreur que ses ouvrages précédents. Ça, je ne saurais dire. Reste que j'ai longtemps hésité avant d'ouvrir le court bouquin de quelque cent pages. J'ai rapidement compris pourquoi.

Précisons que Contre Dieu est une longue phrase qui dure du début à la fin. Écrit à la deuxième personne: "Tu te lèves, tu te regardes dans le miroir et tu pars... etc.", il ne laisse aucun répit. dès les premières pages, il vous prend votre souffle. Il s'agit habituellement d'un style qui m'énerve au plus haut point. Là, je pense particulièrement à Putain, de Nelly Arcand, que je n'ai jamais réussi à finir. Mais pour Sénécal, je dois avouer qu'après 30 pages lues tout d'une traite un soir avant le dodo... j'ai rêvé de ce bouquin. Un rêve étrange et très angoissé. C'est pour dire combien c'est fort. Non, ça ne m'arrive pas souvent et oui, ne vous en faites pas, je vais bien!

Un homme apprends la mort de sa famille, femme et enfants, dans un accident d'auto. Affecté, touché, défait, il déjante puis s'enfonce et s'enfonce encore. Noir? Le mot est faible. Mais attention: il n'y a pas ici de scènes sordides, d'horreur à l'hémoglobine jaillissante. Non, ou sinon très peu. En fait, le plus dur dans ce livre, c'est son hyper-réalisme.


Fort heureusement (et le terme ici n'a d'heureux que le mot), arrive une scène à peu près à mi-chemin qui nous fait nous dire qu'il s'agit bel et bien d'un roman, que non, voyons, ça peut pas arriver quelque chose comme ça. N'empêche. Il y a longtemps que je n'ai eu envie de terminer un livre comme ça. Chaque plongeon dedans me frappait comme un coup de poing. Et pourtant il me fallait aller jusqu'au bout, comme le personnage du livre. Ce livre vous défait. Peut-être suis-je trop réceptif aux histoires, je sais pas. Ça ne m'empêche pas d'en souligner le caractère absolument remarquable. En fait je suis stupéfait. Cette histoire est, de loin, une des pires, en termes de conséquences, de tristesse, de malheur, et tout ce que vous voulez dans le genre, que j'aie lue. Seul, peut-être, L'Adversaire, d'Emmanuel Carrère, m'a laissé une même impression d'horreur, mais certainement pas aussi forte que Contre Dieu dont le titre, en passant, même s'il paraît un peu fort, prend tout son sens dans les deux derniers mots du roman.

À ne pas prendre avec des pincettes, absolument pas, ni lire en vacances. Mais à lire, quand même, pour découvrir une voix vraiment très forte et qui fait très mal. Aoutche, mais bravo.

1 commentaire:

mhv a dit…

Le cauchemar, je l'ai fait avant de le lire ! J'ai rêvé à ce bouquin et mon rêve était tellement horrible que je n'ai pas encore osé l'ouvrir. Mais, ça viendra...