mercredi 24 juin 2015

Six degrés de liberté, par Nicolas Dickner, éditions Alto

C'est d'abord l'histoire d'un geek agoraphobe de quinze ans et de son amie d'enfance qui poursuivront leurs rêves malgré tout ce que la vie aura pu leur mettre comme bâtons dans les roues. Or à cet âge-là, il y a peu pour nous arrêter.

C'est aussi l'histoire d'une ex-fraudeuse de presque quarante ans maintenant employée par les forces policières qui ne croit plus tellement à une vie meilleure, telle qu'elle se l'était imaginée avant.

Et, dans le plus pur style de Dickner, ces vies se rencontrent dans des circonstances et des lieus qu'on n'aurait jamais imaginées au début de ce livre. Parce que cet auteur québécois écrit des romans d'aventure. Il s'en passe, des choses, dans ces Six degrés de liberté, même qu'on se demande, en refermant le livre, si c'était vraiment plausible tout ça. Théoriquement, oui, mais pratiquement, ça frôle le rêve hollywoodien. Pas grave...

Loin du roman contemplatif, Six degrés... donne quand même à penser. Cet auteur est intelligent. Je le soupçonne même d'être lui-même un geek du plus pur acabit. Entre Huntingdon, à la frontière Québec-USA, Copenhague et la stratosphère, il nous emmène à travers un labyrinthe d'abord confus qui devient de plus en plus clair au fur et à mesure que se placent les morceaux de son puzzle.

Commencer un livre de Dickner est exigeant. Ses personnages sont peu flamboyants, voir même timides, plutôt asociaux. Ses décors vont d'endroits quasiment trop communs comme un magasin Ikea, à d'autres de prime abord plutôt trash comme un quartier de maisons mobiles. Bref c'est généralement gris. Puis, de scène en scène, se dessine un fil conducteur qui intrigue. Ce fil est tracé par des descriptions savoureuses où les couleurs s'amènent par l'entremise d'accessoires, de lieux secondaires ou de situations incongrues qui, le plus souvent vous font sourire. Puis on est happé et on se demande quel bateau il a bien pu nous monter.

Parlant de bateaux... Si vous avez lu d'autres commentaires sur ce livre, vous avez sans doute remarqué qu'on y parle beaucoup de conteneurs, ces grosses boîtes de couleur transportées par bateau qui contiennent tout ce qui se consomme en ce bas monde. Oui, les conteneurs prennent une bonne place, mais pas toute. Outre ce monde organisé de la consommation humaine, il y a celui, désorganisé, des vies humaines. C'est là un autre parallèle que Dickner nous montre avec son histoire et ma foi, c'est efficace. La liberté se trouverait-elle en dehors "du système"? Disons que ça ressemble à ça...

S'il ma d'abord vu septique, ce roman m'a vite rattrapé, puis conquis. Nicolas Dickner est un excellent conteur, un fin interprète des sentiments humains et un habile manipulateur de l'attention de ses lecteurs. Qui ne l'a jamais lu pourrait très facilement commencer par cet ouvrage. J'avoue candidement ne pas avoir gardé un souvenir très précis de ses deux précédents, dont Tarmac, mais j'ai sans doute été assez charmé pour avoir le réflexe instantané de sauter sur ce livre dans ma librairie préférée, ce qui était une bonne idée.

Pour un bon roman d'aventure, écrit avec beaucoup d'intelligence: valeur sure!

Aucun commentaire: