mardi 13 janvier 2009

Presque 39 ans, bientot 100, par Fred Dompierre, Éditions Boréal


Est-ce un crime que d'avouer qu'un livre nous a d'abord attiré par sa couverture? En tout cas, fameux choix des éditions Boréal. Les couleurs de la peinture de Nicolas Grenier m'ont non seulement fait me retourner mais ont aussi donné le ton au "récit" de Dompierre. "Récit", oui, sans doute parce qu'écrit sous la forme d'un journal.

Celui-ci s'étend sur environ deux ans. Un gars s'y raconte. Bon OK, avouons aussi qu'en quatrième de couverture, on parlait du récit d'un heureux membre de la génération X. Ce me concerne ouais, sauf qu'on sait déjà qu'on a toujours écrit le pire sur cette fameuse génération, rarement le meilleur. Cet ouvrage le confirme, bien que Dompierre ne s'appitoie pas sur le sort de toute une génération mais bien sur le sien. On est fixés d'entrée de jeu: l'auteur nous dit qu'il n'aime pas la vie. Pas que la sienne seule, mais la vie en général. Puis on ne tarde pas à constater que de verres en alcools, le gars se vautre aussi dans les anti-dépresseurs. Pas jojo, absolument pas.

Mais voilà, est-ce par voyeurisme ou par attrait de la comparaison, je ne saurais dire, mais j'ai facilement traversé le spleen de Dompierre. Bien écrit, sans fla fla, avec assez de franchise pour qu''il se laisse aimer et détester au fil des pages. Que je le veuille ou non, j'y ai vu des épisodes vécus dans mon entourage et même chez-moi. Dieu merci, il faut le dire, j'ai lu ça pendant les Fêtes. L'atmosphère bonenfant qui régnait autour de moi a sans doute tamisé la noirceur qui se dégage du livre. Vous dire franchement, si j'avais lu ça l'été passé, je me demande quelle opinion j'aurais pu en avoir: soit sublime, soit le contraire.

Quoi qu'il en soit, lire les tourments d'un adulte mal dans sa peau, qui vit dans la même ville que soi avec à peu près les mêmes ressources, ça touche. Faut-il être courageux pour publier un tel bouquin? Peut-être, je ne saurais dire. Moi, en tout cas, j'ai ressenti que Fred Dompierre a dû faire, en achevant la rédaction de son livre, exactement la même chose que j'ai fait en terminant de le lire: pousser un grand soupir.

"Presque 39 ans, bientôt 100" peut être une curiosité pour qui ne se sent pas concerné par le contexte et un prétexte à réflexion pour qui s'y identifie ne serait-ce qu'un peu. À déconseiller aux dépressifs, mais certainement pas à dénigrer pour autant.

dimanche 11 janvier 2009

La deuxième vie de Clara Onyx, par Sinclair Dumontais, éditions Hamac


Agréable de parler d'un cadeau! Celui-là m'a été offert par une amie dont une des infinies qualités est d'être très près des éditions du Hamac... un filiale (?) des éditions du Septentrion.

J'ai "découvert" le livre sur mes étagères à la veille des Fêtes, attiré par sa minceur physique et par sa quatrième de couverture.

Un événement cosmique fait en sorte que la Terre se met à tourner de l'autre côté, ce qui a pour effet de remonter le temps. Il n'avance plus, il recule. Les gens rajeunissent, les morts revivent. Clara Onyx était une artiste majeure, chanteuse, morte assassinée à 24 ans. Or voilà que comme tous les trépassés, elle revient. Le livre relate sa "revenue" par les témoignages de gens de son entourage. Tous sont interrogés par un inconnu, tellement inconnu en fait que jamais on ne le connaîtra... ni même le lira. Les interventions de l'intervieweur sont relatés par la très stoïque expression suivante: (...). Cette forme interrogatoire a ceci d'original qu'on a l'impression de lire un rapport de police. Au début, ça laisse perplexe. On se demande bien qui a intérêt à poser toutes ces questions. Puis à force, on se rend compte qu'on a terminé le livre sans pour autant s'ennnuyer et qu'on a oublié la nature de l'intervieweur (dont on aurait quand même aimé qu'il prrenne un peu plus de place).

Je me dois de souligner une anecdote amenée par le temps, comme quoi les hasards forgent parfois non seulement les vies, mais aussi les opinions. Pendant que je lisais "La deuxième vie...", je suis allé au cinéma voir "The Curious Case of Benjamin Button". Stupéfaction: l'histoire de Benjamin Buton est exactement la même que celle vécue par les personnages du livre de Sinclair Dumontais. Hasard ou inspiration? Sais pas. Reste que la nouvelle de Francis Scott Fitzgerald est arrivée avant. On a beau croire qu'elle aura inspiré plusieurs histoires, dont celle dont il est ici question. Qu'en penser?

En musique, lorsque j'entend quelque chose de nouveau, je sais pas pour vous mais moi, j'ai toujours tendance à faire des rapprochements avec des trucs que je connais pour "cataloguer" la nouveauté au sein de la discographie de mes préférences. Je croirais que c'est la même chose en littérature. On compare souvent un auteur à un autre par son style, et parfois, on a l'impression qu'une certaine scène d'un bouquin a été tiré d'un tel autre dont on se souvient. C'est ce qui est arrivé ici. Reste que dans une histoire où le temps joue un rôle principal, c'est quand même bizarre qu'une "question de timing" nous fasse inévitablement comparer l'histoire à une autre semblable dans la forme.

Si le genre vous intéresse, si les comparaisons sont votre tasse de thé et si vous désirez découvrir un auteur québécois peu connu, mettez donc la main sur "La deuxième vie de Clara Onyx".

mardi 6 janvier 2009

Ce que le jour doit à la nuit, par Yasmina Khadra, éditions Julliard


Déjà, avec un aussi joli titre...

Je n'avais rien lu de Khadra, mais une entrevue entendue à la radio m'a donné envie de le lire. Déjà intrigant de savoir que le mec a pris le nom de sa femme comme nom de plume. Caractéristique qui m'a d'abord laissé perplexe, redoutant les charges féministes ou autres trucs du genre. Mais rien de tel. Ce livre est la chronique d'un homme né en Algérie française. En toile de fond: la guerre d'Algérie, avant, pendant et après.

C'est loin d'un Québécois la guerre d'Algérie, si loin. Cette histoire nous fait vivre une époque mouvementée de l'intérieur. Le narrateur est un homme, pas nécessairement l'auteur, qui raconte sobrement et efficacement. Les mots sont simples, les personnages aussi. En fait, à un certain moment, j'ai cru avoir affaire à une simple histoire d'amour difficile et tristounette, et plus j'ai avancé, plus j'ai embarqué, jusqu'à être totalement envouté par cet univers.

Lire, c'est bien souvent voyager, autant géographiquement que temporellement. Ici, les deux ont compté. En refermant "Ce que le jour doit à la nuit", j'ai longtemps ressenti la terre sèche d'Algérie, ces gens pris dans quelque chose qui a déterminé leurs vies sans qu'ils sachenent vraiment ce qui leur arrivait.

Ça vaudrait bien la peine de lire quelque chose d'autre de Khadra. En fait j'en ai bien envie.

Franchement, depuis quelques mois, mes choix de lecture ont été tellement bons que j'ai juste envie de tout lire, de tout prendre. Je dois être dans une phase où je me laisse facilement emporter, voir mener en bateau. Lire c'est â aussi: décrocher, ne pas voir ni sentir le paysage qui défile pendant qu'on est plongé dans le bouquin.

Jusqu'ici, franchement, j'ai pas trouvé mieux comme activité!