lundi 8 octobre 2007

Introduction



Je sais pas pour vous, mais pour moi, le Père Noël arrivait en hélicoptère sur le toit du Dominion de Place du Saguenay, à Chicoutimi. C’était vers la mi-novembre, pendant cette saison sans personnalité où le froid précède la neige et gèle avec lui toute occasion de divertissement. Aussi cette arrivée relevait-elle de l’expérience mystique à tendance hystérique la plus pure. Je parle ici du début des années ‘70, un temps où on découvrait encore que les façons d’être heureux pouvaient provenir d’ailleurs que de notre communauté proche ou notre cocon familial.
Ma mémoire ne me permet pas de me souvenir des conversations, des couleurs, de la quantité de gens, mais je ressens encore la foule animée, grouillante, debout sur le stationnement. Tous faisaient face au centre d’achat où rien ne se passait jusqu’à ce qu’on l’entende. L’hélicoptère. Fallait trouver d’où provenait le bourdonnement. Il remontait le boulevard Talbot depuis le centre-ville et venait nous assourdir en se posant sur le Dominion.
Puis le Père Noël sortait. Elvis et les Beatles n’étaient rien à côté de ça, que de petites pierres qui roulaient sous les chaussures, ailleurs. Il était là, le vrai, inaccessible mais si près. Il nous faisait des bye-bye et de son gros sac rouge, il sortait des bonbons, plus souvent des tires de la Ste-Catherine, qu’il lançait dans la foule comme on nourrit des oiseaux. Alors c’était l’affolement, on se tirait les uns sur les autres pour ramasser des bonbons. Je me souviens de ma mère les bras en l’air essayant d’en attraper. Ça avait quelque chose de violent et de sublime en même temps. Je devais frôler le seuil de l’évanouissement tellement j’étais énervé. Puis il remontait dans l’hélico après nous avoir peut-être dit quelque chose avec un porte-voix, je ne sais trop, et il disparaissait pour aller s’installer en face du Simpson-Sears ou chez Gagnon & Frères, sur la rue Racine. J’y pense encore, là, et j’ai le coeur qui a tendance à s’emballer.
Je raconte ça parce que c’est exactement comme ça que je me sens du moment où je vais bouquiner jusqu’à celui où j’ouvre mon livre pour la première fois. Je ressens l’excitation de qui vivra une nouvelle histoire, de celui qui partira en voyage. Je n’exagère pas. Vous comprendrez peut-être déjà que je ne lis que des romans. Les quelques essais que j’ai acheté au cours des dernières années m’ont plus souvent ennuyé, sauf exceptions. Pour moi, le roman représente l’évasion, et s’il est bien écrit, que les mots s’y alignent comme sur une musique que j’aime, j’embarque d’autant plus.
Je nage allègrement dans la littérature française et étrangère. Je fais ici abstraction de la littérature “populaire” américaine, celle publiée en “paper-back edition” dont toutes les histoires se ressemblent, écrites pour séduite les producteurs de films à gros budgets. Les John Grisham, John Irving et compagnie sont pour moi insipides et ennuyants, sans style particulier qui ne les distinguent. J’aime pas.
Les grands succès populaires du style Da Vinci Code ou Harry Potter soulèvent ma méfiance. Je me les procure rarement. Je revendique le droit à questionner les succès populaires, autant en littérature qu’en cinéma ou en musique. Je considère que la société de modèle américain a tendance à tout niveler par le bas, laissant paraître des sentiments aussi gros et lourds, sans finition, qu’un gros Big Mac, si on le compare avec n’importe quel autre type de nourriture. Ainsi en est-il de la littérature. Je n’ose pas croire que Da Vinci Code soit un bouquin écrit avec finesse par quelqu’un dont on sent qu’il écrit parce que telle est sa vie, qu’il est né pour ça. Des écrivains écrivent naturellement comme d’autres chantent ou jouent du piano. Et ça se sent. C’est ce que j’aime découvrir ou retrouver lorsque je tombe dans un autre ouvrage d’un auteur qui m’a déjà transporté loin dans son imaginaire. Attention, je ne parle pas ici de science fiction ou de fantasy, mais d’histoires, tout simplement. Peu importe le temps ou l’endroit, du moment qu’elles me soulèvent, qu’on me permette d’en créer le décor et imaginer les visages des personnages, moi j’embarque.
Les Français, bien entendu, par la quantité, et souvent par la richesse de leur écriture, ont ma préférence. Plusieurs Québécois s’inscrivent aussi dans ce club, et nombre d’étrangers, tous bien traduits.
Mon aversion pour les best-sellers ne m’empêche quand même pas de me procurer de gros vendeurs de temps en temps. En fait, je ne choisis pas un livre en fonction de son succès, bien qu’une bonne critique dans un journal ou à la radio attirera facilement mon attention. Amateurs de littérature américaine, ne le prenez pas mal. J’ai mes favoris q ui proviennent de ce pays. Les Auster, DeLillo, Easton-Ellis et consorts sont pour moi des équivalents à plusieurs qui proviennent d’ailleurs. Incontournables, même. je les lis la plupart du temps en français, quoi qu’un bouquin en anglais peut parfois passer entre mes mains.
Je n’ai pas de télé, c’est par choix et intérêt personnel et non par snobisme. Ce médium m’ennuie et me frustre. Je n’aime pas me faire imposer un choix d’images. J’aime pouvoir assimiler une partie de l’histoire en l’arrêtant un peu, me faire mes propres décors. Et l’information produite par la télé me semble si simpliste que je n’ose croire que la majorité de la population se laisse berner par des analyses aussi pauvres dans le seul but de se “divertir”. Je ne crois pas que de bouffer des propos frôlant la propagande commerciale soit un divertissement. Je crois plutôt qu’il s’agisse d’une forme d’enrôlement volontaire aux principes de base de la société de consommation.
M’enfin, bon... Ce blog comportera non seulement mes idées sur les livres que je viens de lire, mais sur ceux qui ont fait ce que je suis, ceux qui ont forgé mes goûts. Je ne me permettrai aucune censure, ni dans le dégoût, ni dans la dithyrambe. Je suis habituellement un bon public et avec le temps, mes choix comportent plus de valeurs sûres que de sauts dans le vide. J’en profiterai certainement pour pousser certains parallèles avec l’actualité ou certains faits de société suggérés par une lecture ou une autre. Ainsi va la littérature qu’elle puise toujours dans une part de réalité, soit-elle actuelle, future ou historique.
Reste la musique. J’en parle ici parce qu’elle prend elle aussi une grande part de ma vie. Or, je ne me considère pas comme suffisamment connaisseur de tous les styles pour pouvoir me permettre d’en faire la critique ouvertement sur la place publique. N’empêche que de glisser certains coup de coeurs sera tentant, surtout si l’on considère que certains livres deviennent, au fil des pages, prétextes à écouter un certain type de musique, en fond sonore. Je me souviens même de certaines scènes de livres qui se sont exacerbées à ma mémoire grâce à l’ambiance musicale qui m’entourait alors.
Je n’ai pas tout lu, oh que non, et jamais ne pourrai prétendre tout connaître de tous ceux qui écrivent. Mais j’affirme sans honte que j’aime suffisamment lire pour me permettre de comparer plusieurs ouvrages les uns aux autres. Je vis dans une société où lire n’a pas la cote. On vous taxe trop vite, au Québec, d’intellectuel, qualité honnie à l’échelle américaine, ou de snob, autre qualification que je crois issue d’un sentiment de frustration et de pauvre confiance en soi. Quoi qu’il en soit, je ne lis que pour moi et me retiens généralement d’étaler mes lecture à qui n’en a rien à foutre. Que ce ce blog soit prétexte à partager ce qui, de loin, me rend le plus heureux: mes livres.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bienvenue dans la blogosphère cher Alain!!! Je viendrai te voir souvent et commenterai parfois. Tu es déjà dans mes liens RSS (ce que je suis rendue techno HAHAHA).
Et c'est fou mais dans tes livres de l'automne j'ai déjà lu Mauricio et Zoli, mais je t'en reparlerai dans les articles concernés!! ;-)