samedi 5 juin 2010

Invisible, de Paul Auster, éditions Actes Sud/Leméac


Le thème du roman dans le roman n’est pas nouveau, sauf s’il est amené par Paul Auster. Je ne vois pas de meilleure façon pour vous présenter Invisible.

Parlons d’abord d’un roman noir, pas tant dans sa forme que dans son esprit. Parce qu’il s’agit ici d’un noir luisant, réfléchissant, celui qui nous ramène à nos propres démons intérieurs. En terminant Invisible, le lecteur est en droit de se demander comment serait sa vie s’il laissait aller la sombre partie de lui-même. On en a tous une non?

La plupart des personnages des romans de Paul Auster nous réfèrent “au pire”, sans pour autant donner dans l’horreur. Or ici et plus que jamais, Auster provoque. Il provoque fort. J’en imagine plusieurs qui seront tentés de refermer ce livre à certains passages. Et pourtant je ne parle pas de sang et de tripes, ni de porno hard core. Non. Il ne s’agit que de scènes, d’idées en fait, considérées comme taboues. Là comme ailleurs, il nous ramène à nos principes, à nos fantasmes, à nos limites. Et pourtant, on ne peut que se rendre jusqu’au bout du livre, parce que si on est d’abord choqué, on devient rapidement fasciné. L’écriture, le monde de Paul Auster, tout ça nous enveloppe, nous prend et nous donne l’envie d’aller vite voir ce qu’il en ressort de cette histoire de poupées gigognes où tout ce qui arrive n’est peut-être pas arrivé, où tout ce qui est raconté pourrait pourtant être vrai... sans l’être.

Paul Auster est essentiel à notre temps. Géant de la littérature américaine, on ne sent pourtant aucune prétention à impressionner dans ses livres. Que de l’intelligence, vive, sournoise même, et cette intention manifeste de provoquer. Il est heureux que Paul Auster vive en Amérique: Il en décrit si bien les travers.

Bizarrement, les derniers récits de Paul Auster ne m’ont pas marqués. Jamais ne m’aura-t-il ennuyé ou même déçu. Seulement aurai-je oublié certaines de ses histoires. Or, celle-ci me restera en mémoire. Dans le genre du roman sombre, Invisible est, et de loin, l’un des plus captivants que j’aie lu jusqu’ici.

Ah, et surtout ne pas oublier de souligner l’excellente traduction de Christine Le Boeuf. Ayant vécu plusieurs frustrations en la matière ces derniers temps, je tiens à souligner la qualité de celle-ci. Traductrice fidèle à Auster depuis des années, Le Boeuf sait pertinemment comment rendre la langue de Paul Auster. Chapeau.

Procurez-vous le tout de suite.

1 commentaire:

Claudio a dit…

Je découvre votre blog aujourd'hui et j'aime beaucoup!

Vous saviez que Christine Leboeuf ne sera plus, dorénavant, la traductrice de Paul Auster ? Hubert Nyssen l'aurait annoncé, l'année dernière, dans ses Carnets disponibles sur la toile.

Je n'ai pas lu son tout dernier (pas encore traduit), mais ça viendra très vite.

Bonne journée!
Claudio