C'est mon troisième roman de Lise Tremblay et ce ne sera pas le dernier. La lire, c'est comme de se faire faire dire "Ça va bien aller" par une personne qu'on aime après une crise d'angoisse. C'est ainsi que je me sens depuis que j'ai terminé son livre et j'en voudrais encore.
Saguenéenne, Lise Tremblay est une des plus scandinaves des auteurs québécois. Son écriture est épurée, calme, un peu froide et elle va doit au coeur. Ses personnages ont toutes ces qualités sauf une: ils ne sont pas calmes, enfin pour la plupart. Tous vivent leurs angoisses à l'orée d'un parc, dans une petite communauté aux contreforts d'un village où le rythme suit celui de la forêt qui l'entoure. Gens simples, leurs préoccupations proviennent de leurs interactions avec leurs proches. Qu'est-ce qu'un tel pensera de ça? Que dira un autre si je fais ça?, etc. Or, de telles préoccupations peuvent devenir des obsessions lorsque que rien ni personne n'est là pour pour aider à relativiser ce qui vous semble une montagne. Votre idée fixe, qui parait bien mince pour les autres, surtout ceux qui ne vivent pas les mêmes préoccupations que vous, devient bientôt une mur qui semble infranchissable. C'est ce que vivra un des personnages de ce livre d'une auteure qui connaît bien les gens dont elle parle.
Les bêtes, et donc, la chasse, remuent les habitudes tranquilles des habitants du village, aujourd'hui comme avant. C'est un dentiste à la retraite qui raconte cette histoire. Il est venu de Montréal s'établir au Saguenay justement en raison de son amour de la saison de chasse, qui, avec le temps, s'est muée en un besoin de refuge dans son chalet devenu résidence principale, où il vit avec son chien. Ses voisins deviennent peu à peu ses proches alors que sa famille, son ex-femme et sa fille, eux, s'éloignent.
De ces personnages, deux verront venir la mort, ce qui inclut son chien, et une autre vivra une nouvelle vie. Le narrateur vivra ces débuts et ce recommencement entouré de ces gens simples dont les interactions font penser à celles d'une meute de loups, pas dans le sens du méchant loup, mais dans celui de l'animal sauvage dont le seul but est de vivre, et bien souvent, de survivre.
Lise Tremblay écrit comme certains savent qu'ils attireront l'attention en parlant bas plutôt qu'en élevant la voix. Sage, droit et sensible, son style me saisit à chaque fois. Loin des actions enlevantes, elle sait fait ressortir la splendeur de la lenteur, la profondeur des décors les plus simples, et les plus belles sensibilités des gens les plus renfrognés. Avec le Saguenay comme décor, on se dépayse dans un rythme de vie qu'on craint et qu'on envie en même temps grâce à l'immense talent de cette auteure de plus en plus incontournable.
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