lundi 8 janvier 2018

Le sous-majordome, par Patrick Dewitt, éditions Alto

L'auteur des Frères Sisters revient nous confirmer que ça spécialité, c'est l'ambiance étrange. Très théâtral, ce Sous-majordome mélange des dialogues à la Beckett dans un décor à la Kafka avec une histoire à la Lewis Caroll.

On parle ici d'une histoire très dense. C'est qu'il s'en passera des choses dans la vie du petit Lucien, parti assez jeune de son village pour aller travailler au château d'un riche baron, dans un autre village assez éloigné pour qu'il lui faille s'y rendre en train. On est fixés dès les premières pages sur le type de personnages qu'on y rencontrera. Comme une Alice dans un pays pas vraiment merveilleux mais vraiment étrange, Lucien nous semblera bien souvent le seul être "normal". Sa mère, même, craint un peu, et contribue à faire débuter le livre sur les chapeaux de roue. Puis, vient le voyage en train, avec d'autres personnages, et suivent les rencontres du majordome, du baron, de villageois et de bien d'autres êtres étranges.

Les descriptions des endroits et des gens m'ont souvent ramené aux ambiances de films aux personnages bédéèsques, comme le Delicatessen de Caro et Jeunet, par exemple. Ces personnages sont forts même dans leur modestie. Tranchants, sans fioritures, chacun a d'abord l'air destiné à ne jouer qu'un seul rôle, le sien, dans sa propre bulle, sans trop d'empathie pour les autres. Pourtant, à force de rencontres, l'empathie et même l'amour feront surface pour Lucien. Le roman en devient alors un d'apprentissage, non seulement des choses de l'amour, mais aussi de la vie, du sens qu'elle peut avoir pour chacun, et dieu sait que le manque de sens est justement ce qui en marque plusieurs...

Le Sous-majordome est truffé de scènes délirantes en des lieux vraiment très singuliers. Le château à lui seul vaut son pesant d'or, mais aussi un autre endroit, situé dans la campagne environnante, où se passeront d'autres scènes autour desquelles tournera tout le livre. Souvent étourdissant parce que bouillonnant de rebondissements, on sort de ce livre en se disant qu'il aurait pu en constituer 2 ou 3 tellement l'histoire ou le caractère de chaque personnage est riche.

Ce livre contient toutefois un important bémol puisque plusieurs de ses pages, particulièrement vers la fin, contiennent de grossières erreurs d'éditions. Mots dédoublés, manquants ou phrases carrément illisibles laissent parfois supposer une révision mal faite ou une date de tombée un peu exigeante pour le traducteur ou le réviseur. Ceci n'empêche pas la lecture du livre, mais l'évidence de ces erreurs laissent un peu perplexe. En espérant que l'éditeur n'ait pas simplement décidé de laisser passer, que ce n'était pas si grave. Oui, ce l'est. Et c'est dommage aussi, car il s'agit ici d'un excellent texte qu'on a un peu barbouillé.

Reste que le Sous-majordome confirme le talent de Patrick Dewitt, qui est en train de faire sa marque avec un style unique. On en veut encore des comme ça... mais bien traduit, et révisé!

2 commentaires:

Danielle a dit…

J'ai adoré ce livre, mais je dois dire que je l'ai lu dans sa version originale.

Alain a dit…

... ce qui est sans aucun doute une excellente idée. C'est d'ailleurs ce que je devrais faire avec le prochain bouquin de Patrick Dewitt.