Roman, essai, chronique, encyclopédie: voici un livre inclassable sur un sujet casse-gueule par exellence: Israël et la Palestine aujourd'hui. J'ai hésité longtemps. Ce confilt dure depuis si longtemps et retient si souvent l'attention des médias qu'il semble bien loin le jour où on en fera un divertissement. C'est en tout cas l'appréhension que j'avais en le commençant, comme si je connaissais déjà l'histoire et sa fin. Mais le défi est relevé avec brio par un écrivain au sommet de son art. Ce livre est intéressant à plusieurs égards.
L'auteur prend tous les moyens qu'un livre puisse offrir pour capter notre attention. Il raconte d'abord deux histoires, celle d'un Israélien, et celle d'un Palestinien. Les deux se connaissent. Ils parcourent le monde ensemble pour témoigner de leurs histoires respectives, différentes mais semblables: tous deux ont perdu une enfant dans un attentat. Chacun à des époques différentes. Leurs témoignages constituent une bonne partie de ce livre et c'est totalement captivant.
Mais autour de ces deux histoires, McCann raconte ce coin de Terre, pas tant son histoire que ce qu'il est maintenant. On en apprend alors sur ce carrefour de routes d'oiseaux migrateurs, des propriétés de l'eau de la Mer morte, de l'assèchement du fleuve Jourdain, des checkpoints autour de Jérusalem, de la gestion de l'eau dans les villes Palestiniennes et les colonies israéliennes, des minbärs, de la guerre de 6 jours... et sur chacun de ces sujets, et plusieurs autres, c'est passionnant. Au fur et à mesure qu'on avance, on veut en apprendre plus et le livre devient un genre de Wikipédia sur un univers qu'on croyait connaître et dont on ne soupçonnait même pas la réalité.
Le livre est séparé en courts chapîtres/paragraphes numérotés qui montent jusqu'à 1000 pour reescendre à zéro. Un paragraphe peut parfois être une phrase. Cet effet de style est assez spectaculaire et, à mon sens inutile. La force du récit donne à Apeirogon une force incomparable, un genre d'apparence de livre idéal qu'on n'aurait pas eu besoin de séparer ainsi.
Au centre du livre, résident les témoignages tels que les 2 premiers personnages les livrent lors de leurs conférences. C'est extrèmement touchant. Ces réquisitoires parlent de paix, bien entendu, et c'est à partir de là où on voit de quel côté penche la balance, tant celle du parti que prend l'auteur que de celui qu'est en train de prendre l'Histoire. Je vous laisse deviner qui, des parties israéienne ou palestienne, prend le blâme, mais qu'importe, ce livre/chronique sur ce coin troublant du monde vous aidera à vous en faire une opinion.
Les pères de jeunes filles tuées, leurs mères, l'histoire récente de leurs familles, leur environnement, leur école, leurs idoles, leur pays, tout y est. Écrit par un écrivain plutôt qu'un journaliste rend sans doute la chronique plus poignante, plus émotive, et c'Est tant mieux.
Je n'ai pas tout aimé de Colum McCann, mais Apeirogon est au moins l'équivalent de Let the great world spin (Et que le vaste monde poursuive sa course folle), le premier livre que j'ai lu de lui et que j'ai tant aimé. En vous le procurant, découvrez ce qu'est un apeirogon, ce qu'est Israêl, la Palestine et ce que la littérature contemporaine a de meilleur à donner. Quels bons moments il vous fera passer.
Apeirogon est traduit en français et est publié chez Belfond éditeur.
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