lundi 20 novembre 2023

Le fenêtre au sud, de Gyrdir Eliasson, éditions La peuplade

Si les livres avaient le pouvoir de se transformer en objet, je ferais de celui-ci une couverture chaude. Confortable, prétexte à prendre une pause, mais peut-être étouffante si utilisée trop longtemps, j'ai aimé m'envelopper de La fenêtre au sud. C'était une bonne idée de revenir rapidement à Gyrdir Eliasson peu de temps après Requiem, qui m'a procuré la même impression de réconfort.

Un homme vit temporairement dans la maison empruntée à un ami (comme dans Requiem). C'est une maison de vacances, sur la côte islandaise. Ses environs ne sont habités que pendant la belle saison, jusqu'à tard en automne. Autrement, notre homme est le seul résident du coin, et l'univers habité le plus près est le village, qu'il doit gagner avec sa voiture lorsqu'il en a besoin.

L'homme est là pour essayer d'écrire. Je dis "essayer" parce que l'exercice est difficile. Le livre raconte ses tentatives rarement réussies, et ses échecs qui se soldent par des marches dans les environs, vers un phare, sur le bord de l'océan, parfois au village, ou par des regards jetés sur la mer, qu'il entend de chez-lui. Constitué de courts paragraphes ou de demi-pages indépendants les uns des autres, le livre nous fait avancer lentement à travers quatre saisons que l'homme passera dans cette maison.

Avec lui, on se demandera un peu s'il est bien ou pas, s'il avance ou s'il recule, s'il va rester encore ou partir, si le temps est au soleil ou brumeux. On avance de réflexion en réflexion, on dépose le livre souvent, pour s'imprégner, et on le poursuit plus tard, sans avoir l'impression de l'avoir oublié.

Cet auteur me fait me questionner sur le temps, celui qu'on doit prendre, en se débarassant de l'impression de le perdre. Il nous fait faire un exercice subtil qui nous fait réaliser que si le passé laisse nostalgique et que le futur crée de l'angoisse, seul le présent contient du confort. C'est en tout cas ce que j'en retiens, en plus de l'univers paisible de la mer, des montagnes et des prés qui changent de couleur au gré des saisons. Le personnage semble parfois un peu perdu, mais au bout du compte, on se rend compte avec lui que son seul désir est de rester là, à vivre sa vie dans sa petite maison empruntée, loin du monde et des tracas. Rien n'est temporaire, du moment qu'on vit au présent. Vraiment, cet auteur me fait le plus grand bien, comme bien des auteurs islandais, d'ailleurs.

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