C'est l'histoire d'une jeune femme à travers les photos qu'elle a prises. Ce sont aussi des histoires de photographes qui ont contribué à la reconnaissance de ce qu'est devenu la photographie. C'est enfin qui nous permet de distinguer ce qui dure, dans notre vie, en comparaison de ce qui passe ou de ce qui a passé, de l'éternel en fonction de l'éphémère, du long en comparaison à ce qui est court.
Décédée précocement dans un accident de voiture, et ce dès le début du livre, une jeune femme laisse dans le deuil des membres d'une famille tristement traditionnelle et de rares amis plus ou moins proches. De sa vie, on aura retenu son intérêt pour la photo, seule chose qui l'aura fait sortir du cadre très étroit de sa vie personnelle, où rien ni personne n'a su ni pu mettre une couleur particulière, si ce ne sont que quelques images qui sont restées après elle.
Cette histoire se passe en Corse, à l'époque où des mouvements indépendantistes faisaient sentir leur présence dans une population plus ou moins complaisante à leur égard. Mêlée à eux tant dans sa vie amoureuse que professionnelle, elle vivra les longues attentes et les espoirs inassouvis des choses qui durent sans jamais vouloir aboutir. Cette vie personnelle deviendra vite presque pathétique alors que du côté de son intérêt pour la photo, s'ouvriront des possibilités de s'en sortir.
Parallèlement à cette jeune femme, l'auteur met en scène son parrain, le jeune frère de sa mère, prêtre catholique qui, malgré sa profession, sera celui par qui arrivera le changement, genre de démon tentateur voulant faire le bien en détournant sa nièce de sa vie sans issue, dans un monde qui l'inspire, lui, de moins en moins.
Jérome Ferrari écrit magnifiquement bien. Chaque mot a sa place dans chacune de ses phrases, sans superflu, sans omission. C'est rare. Un tel style permet de décrire en douceur les pires atrocités et en détails les choses les plus enfouies. Documenté, il est allé chercher, pour cet ouvrage, des bribes peu ou pas connues de l'histoire de la photographie à travers des personnages vraiment captivants. Deux "histoires dans l'histoire" se démarquent particulièrement. Un peu déstabilisantes, parce que différents de l'histoire qu'on est en train de lire, ces portions du livre ajoutent toutefois à l'atmosphère générale de passion latente, de désir d'aller plus loin, de se laisser aller à découvrir le monde et de capter des images, comme on capte des instants de vie.
Étonnant à plusieurs égards, À son image ravira ceux qui avaient aimé les livres précédents de Jérome Ferrari, décidément un grand auteur à suivre.
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