dimanche 30 juin 2024

Le miraculé, par William S. Messier, éditions Le Quartanier

Beau plaisir de lecture à savourer pendant les vacances ou un week-end de farniente, Le miraculé raconte une période de vie où l'anodin cachait de l'extraordinaire. Et au-delà du récit, c'est aussi une écriture très dynamique qui rend captivants les souvenirs d'enfance et d'adolescence de l'auteur.

Dans la première moitié du livre, Messier fait la démonstration qu'on n'a pas à être quadragénaire (ou à peu près) pour arriver à rendre sa vie passée intéressante. Puissant conteur, ses mots nous font souvent rire ou nous attendrir. C'est le portrait d'une époque, les années 90, vu par un adulte en devenir qui ne sait pas ce que la vie lui résèrve.

Puis, arrive, et c'est très curieux, un drame qui n'est pas arrivé, c'est ce qui rend de récit unique. Messier raconte comment il est passé, non sans quelques conséquences désagréables, à peu de choses près de voir sa vie basculer. C'est le genre d'histoire qu'on aurait très bien pu inventer, et que ce soit arrivé à quelqu'un rend le récit d'autant plus intéressant.

Ce qui aurait pu être mélodramatique ne l'est pas. C'est plutôt une très sympathique ôde à la vie que ce jeune quarantenaire nous livre. Ça en fait un récit tout à fait approprié pour une période de calme, ou pour vous réconcilier avec la vie, ou pour faire une pause après un ou des livre(s) qui vous auraient brassé les shakras un peu trop fort.

Je termine en mentionnant, sourire en coin, que j'ai hésité un peu avant de me le procurer. Pour tout vous dire, le titre ne m'inspirait pas grand chose qui puisse me plaire. Mais des blogues comme celui-ci m'ont mis la puce à l'oreille, et ils avaient raison.

Ce Miraculé est une belle réussite.

samedi 22 juin 2024

If, de Julien Gravelle, éditions Lemeac

Quel plaisir lorsque votre deuxième expérience de l'oeuvre d'un auteur est meilleure que la première. Pas que Les cowboys sont fatigués m'avait déplu, mais il ne m'avait pas enthousiasmé autant que cet If.

Les 146 pages du livre racontent un mythe familial qui s'étend sur 4 générations, ce qui est déjà un tour de force. Et au-delà du mythe, il y a un personnage primordial: le décor. Flanquée au nord du Lac-St-Jean, cette histoire sent le résineux et la poussière. Gravelle campe son histoire à l'orée de la forêt boréale, près des villages qui vivent de la récolte du bois, dans des chemins récemments défrichés par les jobbeux ou, plus récemment, par les chars des travailleurs forestiers.

Les humains sont taiseux. On est loin du roman d'amour filial, de la terre ou de quoi que ce soit. Mais, et c'est là où luit l'écriture de Gravelle, on se transporte de génération en génération et de sentier en sentier dans une connaissance fine du bois, de son ambiance, de ce qu'il procure de bon et de mauvais.

Ce n'est pas un roman de forêt douceureuse féérique, mais du bois, proprement dit, comme dans "aller dans l'bois" pour y travailler, y fuir quelque chose ou quelqu'un, et rarement pour s'y promener par plaisir.

Les quelques dialogues sont courts, mais vrais. On y perçoit l'accent du coin, et aussi, parfois, celui de l'auteur d'origine française dans quelques descriptions dont celles un peu clichés mais sympathiques de vieux pick-ups. Ah, le bon vieux Chevy...

Il faut lire ce livre pour son ambiance, ses personnages durs, pas nécessairement attachants mais pas désagréables non plus, sauf exception. Dans If, on tombe amoureux d'un sentier tout croche qui débouche sur nulle part, juste parce qu'on sait que c'est pas si loin ni exotique, mais que c'est quand même un tout autre monde. Julien Gravelle nous y emmène avec conviction parce qu'on sent combien il aime ce décor, qu'il nous amène à aimer avec lui. C'est un livre réussi, à lire cet été!

mercredi 12 juin 2024

Baumgartner, par Paul Auster, éditions Leméac/Actes Sud

Baumgartner confirme que Paul Auster aura été un des meilleurs raconteurs de relations. Qu'elles aient été familiales, amicales ou amoureuses, il les aura décrites sous tous leurs angles, en sachant mettre la lumière sur ce qu'elles contiennent de plus beau.

Beaumgartner est un vieil écrivain qui se remémore sa relation avec sa compagne décédée il y a une dizaine d'années. Il parle de ce qui fut et de ce qui reste. Ça fait une tonne de souvenirs rendus radieux par la patine du temps. Ça aussi, Auster l'a bien cerné: le temps fait bien les choses.

On ne tombe pas à la renverse en sortant de Baumgartner, mais quand même émus, comme lorsqu'un ami qu'on aime s'en va pour longtemps. Plus que le monde des personnages d'Auster, ce sont ses lunettes, sa façon de voir le monde qui me manquera, son optimisme réaliste, ses personnages blessés mais résilients, et surtout, amoureux.

Qui a aimé Auster aimera Baumgartner et qui ne connaît pas Auster a ici la belle occasion de le découvrir "à l'envers". Découvrir un auteur de cette trempe en commençant par sa dernire oeuvre me semble une idée formidable, d'autant plus qu'après, vous aurez le plaisir immense de vous plonger dans 4-3-2-1, une oeuvre que je me plais à énumérer parmi mes favorites à vie.

Et que vivent encore longtemps les belles histoires de Paul Auster!