J'ai été sur un petit nuage. Je sors de ce livre plein de respect pour une autrice d'une sensibilité exceptionnelle.
À elles seules, les 25 premières pages vous happent. Un homme est étendu dans une tranchée de la Première guerre mondiale. Il ne sait trop s'il est mort ou vivant. Ses pensées voyagent entre des souvenirs du passé et la réalité, où un autre homme est allongé près de lui en le fixant de ses yeux restés ouverts après la mort.
On retrouve ensuite cet homme et ses pensées qui le poursuivent quelque deux années plus tard. Cette proximité de la mort le hante. Il passe maintenant sa vie en sachant la mort tout près, partout. Cette obsession le suivra jusqu'à sa mort inéluctable, et comme la vie des disparus qu'il mélangeait avec la sienne, comme si des morts poursuivaient des moments de vie par son intermédiaire, son obsession se transmettra à travers celles et ceux qui le suivront.
On retrouvera plus loin sa fille, puis sa petite fille qui, elles aussi, auront un fort désir de vivre, toujours en étant en proximité avec la mort, quelque soit l'époque.
Ça peut paraître morbide, mais c'est d'une luminosité incroyable. Anne Michaels nous dit, dans ses mots vraiment superbes, que la vie se poursuit de toutes sortes de façons, par le souvenir, par nos actions, et par nos amours. Cette autrice décrit l'amour, celui entre deux êtres et celui de la vie, d'une façon splendide. On parlera de poésie pour décrire son écriture. Je n'en suis pas certain. L'autrice utilise des images tellement claires et belles pour décrire des sentiments, des situations, que ça va de soit.
Ses personnages sont tendres, vulnérables et sensibles. Personne ne crie dans ce livre, et si ça arrive, on le devine à travers un chagrin, une stupeur, ou un départ trop rapide. Held est vraiment écrit finement, tout en nous gardant captivé avec ses personnages pleins de volonté, de désir d'agir, d'intervenir, de mordre dans la vie, et de ceux qui les attendent ou qui les voient partir. C'est touchant sans bon sens, beau, délicat, bref...
Ouf.
Held vient de sortir en version française par la traduction de Dominique Fortier sous le titre Étreintes, aux éditions Alto. Anne Michaels est une autrice canadienne que je ne connaissais pas et que je suis trop heureux d'avoir découvert.
dimanche 20 octobre 2024
dimanche 13 octobre 2024
Dents de fortune, par Fanie Demeule, éditions Hamac
Belle découverte d'un roman dont le caractère historique se retrouve dans la finesse de la langue et du quotidien, plutôt que dans la Grande Histoire.
L'autrice raconte une jeune habitante des Îles-de-la-Madeleine qui quittera ses terres et sa famille pour aller vivre à Montréal. Situé il y a une centaine d'années, le récit décrit d'abord magnifiquement la vie extrèmement difficile des Madelinots de l'époque. Bien sur, il y a la mer omniprésente et tout ce qu'elle représente pour les insulaires, mais aussi l'isolement, la crise économique, et surtout, le sentiment d'étouffement que des jeunes, comme l'héroïne, pouvaient ressentir.
On se transporte ensuite en train avec elle jusqu'à Montréal où là aussi, la vie de ces nouveaux habitants arrivés avec rien et prêts à tout pour gagner un peu d'argent, est raconté finement.
La recherche historique se sent tout au long du livre. Elle est saupoudrée avec doigté dans la description d'un paysage, d'une habitude ou d'un métier, ce qui rend le livre aussi intéressant que captivant. Gros coup de coeur pour l'utilisation de mots et expressions tirés de la langue des Madelinots. Il faut souligner avec quelle habileté Fanie Demeule insère ces mots. Ça se fait sans clichés, sans italiques ni guillemets ni incises, comme si ces mots appartenaient autant au lecteur qu'aux personnages. C'est très bien amené, il faut le souligner.
Le dernier quart du livre commence avec un grand drame qui donne un autre ton à la dernière partie du livre, où les événements se bousculent en peu par rapport aux trois premiers quarts. À mon sens, quelques pages supplémentaires n'auraient pas été superflues pour nous permettre d'atterir un peu moins abruptement.
Reste que Dents de fortune est une belle réussite, sobre, hyper bien documentée, teinté d'une belle poésie et d'un amour certain des personnages par son autrice.
L'autrice raconte une jeune habitante des Îles-de-la-Madeleine qui quittera ses terres et sa famille pour aller vivre à Montréal. Situé il y a une centaine d'années, le récit décrit d'abord magnifiquement la vie extrèmement difficile des Madelinots de l'époque. Bien sur, il y a la mer omniprésente et tout ce qu'elle représente pour les insulaires, mais aussi l'isolement, la crise économique, et surtout, le sentiment d'étouffement que des jeunes, comme l'héroïne, pouvaient ressentir.
On se transporte ensuite en train avec elle jusqu'à Montréal où là aussi, la vie de ces nouveaux habitants arrivés avec rien et prêts à tout pour gagner un peu d'argent, est raconté finement.
La recherche historique se sent tout au long du livre. Elle est saupoudrée avec doigté dans la description d'un paysage, d'une habitude ou d'un métier, ce qui rend le livre aussi intéressant que captivant. Gros coup de coeur pour l'utilisation de mots et expressions tirés de la langue des Madelinots. Il faut souligner avec quelle habileté Fanie Demeule insère ces mots. Ça se fait sans clichés, sans italiques ni guillemets ni incises, comme si ces mots appartenaient autant au lecteur qu'aux personnages. C'est très bien amené, il faut le souligner.
Le dernier quart du livre commence avec un grand drame qui donne un autre ton à la dernière partie du livre, où les événements se bousculent en peu par rapport aux trois premiers quarts. À mon sens, quelques pages supplémentaires n'auraient pas été superflues pour nous permettre d'atterir un peu moins abruptement.
Reste que Dents de fortune est une belle réussite, sobre, hyper bien documentée, teinté d'une belle poésie et d'un amour certain des personnages par son autrice.
mardi 1 octobre 2024
Amiante, de Sébastien Dulude, éditions La Peuplade
J'y suis entré de travers, mais j'en suis sorti bien droit. C'est un livre beau et lent, étrange et exigeant, qui mérite son succès, mais qui me fait me poser encore beaucoup de questions.
La force de ce livre, c'est son ambiance. C'est comme si une brûme ou une fine pellicule de poussière enveloppait tout. Dulude raconte un personnage dont l'enfance et l'adolescence sont marqués chacun par un drame. En trame de fond, une cité minière où la beauté est rare, tant chez les gens que dans ce qui les entoure. On dirait que tout y est lent, comme les gros camions, et dur, comme la pierre qui explose à la mine. Dulude raconte ça sans cris, sans flafla, souvent avec des images très belles et d'autres parfois un peu alambiquées, avec tellement de flou qu'on se frotte un peu les yeux (c'est-à-dire: on relit une deuxième fois) pour bien être certain de ce qu'on a compris. Ou on relit parce que c'est tout simplement beau.
Les années 80 et 90, où les deux épisodes de la vie du personnage se passe, ajoutent une touche nostalgique de cette époque, ce qui nous permet de mettre un peu plus de couleurs dans les décors intérieurs que ceux, plus durs, de l'extérieur, qu'ils soient industriels ou forestiers.
Amiante, c'est de la dureté racontée avec douceur, et c'est là, à mon sens, où réside l'exploit. Il mérite son succès, c'est certain, mais...
J'y suis entré de travers à cause du bruit: on a beaucoup moussé son succès critique européen avant même sa sortie. Bon, on peut pas être contre le succès, surtout s'il est mérité, mais était-ce un gage de succès populaire? Puis, en le terminant, j'ai pensé à des auteurs comme Sophie Bienvenu, Jean-Christophe Réhel, ou Larry Tremblay, par exemple et je me suis demandé pourquoi ils n'avaient pas eu le même succès critique européen avant leurs sorties respectives, eux aussi.
Bref, c'est l'industrie, je sais, mais y'a un risque. Tant mieux si Amiante fait son chemin de par le monde après un départ canon. Le risque en valait la chandelle. Mais j'aimerais bien que d'autres paroles du même côté du monde que le mien puissent prendre le même chemin, en bénéficiant de la même lumière.
La force de ce livre, c'est son ambiance. C'est comme si une brûme ou une fine pellicule de poussière enveloppait tout. Dulude raconte un personnage dont l'enfance et l'adolescence sont marqués chacun par un drame. En trame de fond, une cité minière où la beauté est rare, tant chez les gens que dans ce qui les entoure. On dirait que tout y est lent, comme les gros camions, et dur, comme la pierre qui explose à la mine. Dulude raconte ça sans cris, sans flafla, souvent avec des images très belles et d'autres parfois un peu alambiquées, avec tellement de flou qu'on se frotte un peu les yeux (c'est-à-dire: on relit une deuxième fois) pour bien être certain de ce qu'on a compris. Ou on relit parce que c'est tout simplement beau.
Les années 80 et 90, où les deux épisodes de la vie du personnage se passe, ajoutent une touche nostalgique de cette époque, ce qui nous permet de mettre un peu plus de couleurs dans les décors intérieurs que ceux, plus durs, de l'extérieur, qu'ils soient industriels ou forestiers.
Amiante, c'est de la dureté racontée avec douceur, et c'est là, à mon sens, où réside l'exploit. Il mérite son succès, c'est certain, mais...
J'y suis entré de travers à cause du bruit: on a beaucoup moussé son succès critique européen avant même sa sortie. Bon, on peut pas être contre le succès, surtout s'il est mérité, mais était-ce un gage de succès populaire? Puis, en le terminant, j'ai pensé à des auteurs comme Sophie Bienvenu, Jean-Christophe Réhel, ou Larry Tremblay, par exemple et je me suis demandé pourquoi ils n'avaient pas eu le même succès critique européen avant leurs sorties respectives, eux aussi.
Bref, c'est l'industrie, je sais, mais y'a un risque. Tant mieux si Amiante fait son chemin de par le monde après un départ canon. Le risque en valait la chandelle. Mais j'aimerais bien que d'autres paroles du même côté du monde que le mien puissent prendre le même chemin, en bénéficiant de la même lumière.
dimanche 22 septembre 2024
Coco nade, par Julien Beaupré, éditions de la Maison en feu
Voilà un livre qui m'a déstabilisé comme lecteur. Ça m'a fait du bien, puisque ça s'est quand même fait en douceur. Merci à l'auteur. Mais ça s'est aussi malheureusement fait aux détriments du livre.
J'ai été interpellé par ce qu'on en disait: des bribes d'une enfance passée dans un coin de planète dont on entend peu parler: le Témiscamingue. C'est effectivement le cas pour une bonne moitié du livre et cette portion-là est savoureuse. Beaupré prend un ton un peu badin mais respectueux pour décrire l'environnement et les gens. On s'amuse bien et on s'émeut de portraits de gens rendus avec une belle chaleur. À travers ce récit, l'auteur introduit d'abord quelques impressions sur l'état (le métier? je sais pas trop) d'écrivain qu'il est en train de devenir. Puis, ce récit de soi se transforme lentement en une fiction imaginaire où il fait entrer des personnages eux aussi tirés de son enfance, dont principalement son frère. Toujours raconté avec le même ton plutôt goguenard, ce récit glisse dans un monde imaginaire qui, à force, me faisait un peu regretter de ne pas revenir dans les descrpitions nostalgiques de l'enfance du narrateur.
C'est un imaginaire très doux. Ça m'a fait penser à quelquechose entre Raymond Queneau et Boris Vian. C'est bien écrit, bien maitrisé mais pour ma part, mis ensemble, le récit de l'enfance et celui du monde imaginaire ont eu trop peu à m'offrir. Je suis comme resté sur ma faim.
Ceci dit, l'univers onirique et nostalgique m'ont été sympathiques. C'est peut-être seulement son agencement qui m'a perdu un peu.
J'ai été interpellé par ce qu'on en disait: des bribes d'une enfance passée dans un coin de planète dont on entend peu parler: le Témiscamingue. C'est effectivement le cas pour une bonne moitié du livre et cette portion-là est savoureuse. Beaupré prend un ton un peu badin mais respectueux pour décrire l'environnement et les gens. On s'amuse bien et on s'émeut de portraits de gens rendus avec une belle chaleur. À travers ce récit, l'auteur introduit d'abord quelques impressions sur l'état (le métier? je sais pas trop) d'écrivain qu'il est en train de devenir. Puis, ce récit de soi se transforme lentement en une fiction imaginaire où il fait entrer des personnages eux aussi tirés de son enfance, dont principalement son frère. Toujours raconté avec le même ton plutôt goguenard, ce récit glisse dans un monde imaginaire qui, à force, me faisait un peu regretter de ne pas revenir dans les descrpitions nostalgiques de l'enfance du narrateur.
C'est un imaginaire très doux. Ça m'a fait penser à quelquechose entre Raymond Queneau et Boris Vian. C'est bien écrit, bien maitrisé mais pour ma part, mis ensemble, le récit de l'enfance et celui du monde imaginaire ont eu trop peu à m'offrir. Je suis comme resté sur ma faim.
Ceci dit, l'univers onirique et nostalgique m'ont été sympathiques. C'est peut-être seulement son agencement qui m'a perdu un peu.
dimanche 15 septembre 2024
Je est un autre, par Jon Fosse, éditions Christian Bourgois
Je m'étonne encore d'aimer autant Jon Fosse, de trouver dans ses livres quelque chose qui me réconforte. Et pourtant, le narrateur qui se raconte dans cette trilogie est l'incarnation même de l'angoisse. Jamais, je crois, un auteur n'a aussi bien rendu tout ce qui passe par la tête d'un angoissé. Et pourtant, c'est bon et beau comme un poème.
Comme dans le premier livre, on retourne dans la tête d'Asle, qui associe le moment présent à ses souvenirs, ses espoirs passés et ses craintes à venir. " Aie-je bien vécu ma vie? ", se demande-t-il, à travers ses préoccupations pour son ami malade et ses questionnements sur sa profession d'artiste peintre.
Comme la voiture dans laquelle il aime se retrouver pour calmer ses pensées, on embarque avec lui dans ses divagations où, dans une seule phrase, il passe du présent au passé, et du passé au présent. Son angoisse est immense, oui, mais son coeur est bon, et c'est pourquoi, si on se laisse porter par cette écriture dense, on s'attache à lui. Ses questionnements sont les nôtres, ses impressions autres aussi. En tout cas, moi, ça me convient parfaitement.
Quant à tout ce qu'il dit sur l'art, de l'importance qu'elle a dans sa vie, on ne veut que l'appuyer, faire comme lui, qui nous invite même à remplacer sa peinture à lui par la littérature, avec laquelle on fait sa connaissance. Y'a quelque chose de subtil, dans cette oeuvre, qui nous dit: Profitez de ce que vous aimez. L'art ne fait de mal à personne. Sachez l'apprécier, il est partout, au-delà de la vie et de la mort.
Je suis content d'avoir découvert Jon Fosse, et j'espère que d'autres que moi en feront la découverte. Pour l'anecdote, je dirais qu'il est cet autre norvégien, après Knausgaard, dont le style aurait dû avoir un effet repoussoir, mais non. Y'a une magie qui s'opère, et j'embarque. Bon, Fosse, c'est pas Knausgaard, quoi que... Si vous avez aimé le premier, je vous invite à découvrir l'autre.
Et puis bon, pas me retenir, je pousserais bien un petit "Vive la Norvège", tiens.
Comme dans le premier livre, on retourne dans la tête d'Asle, qui associe le moment présent à ses souvenirs, ses espoirs passés et ses craintes à venir. " Aie-je bien vécu ma vie? ", se demande-t-il, à travers ses préoccupations pour son ami malade et ses questionnements sur sa profession d'artiste peintre.
Comme la voiture dans laquelle il aime se retrouver pour calmer ses pensées, on embarque avec lui dans ses divagations où, dans une seule phrase, il passe du présent au passé, et du passé au présent. Son angoisse est immense, oui, mais son coeur est bon, et c'est pourquoi, si on se laisse porter par cette écriture dense, on s'attache à lui. Ses questionnements sont les nôtres, ses impressions autres aussi. En tout cas, moi, ça me convient parfaitement.
Quant à tout ce qu'il dit sur l'art, de l'importance qu'elle a dans sa vie, on ne veut que l'appuyer, faire comme lui, qui nous invite même à remplacer sa peinture à lui par la littérature, avec laquelle on fait sa connaissance. Y'a quelque chose de subtil, dans cette oeuvre, qui nous dit: Profitez de ce que vous aimez. L'art ne fait de mal à personne. Sachez l'apprécier, il est partout, au-delà de la vie et de la mort.
Je suis content d'avoir découvert Jon Fosse, et j'espère que d'autres que moi en feront la découverte. Pour l'anecdote, je dirais qu'il est cet autre norvégien, après Knausgaard, dont le style aurait dû avoir un effet repoussoir, mais non. Y'a une magie qui s'opère, et j'embarque. Bon, Fosse, c'est pas Knausgaard, quoi que... Si vous avez aimé le premier, je vous invite à découvrir l'autre.
Et puis bon, pas me retenir, je pousserais bien un petit "Vive la Norvège", tiens.
mardi 3 septembre 2024
Demon Copperhead, par Barbara Kingsolver, éditions Harper & Collins
Je viens de passer un épisode lumineux de ma vie de lecteur avec Damon Copperhead, un grand livre, c'est certain.
Barbara Kinsolver, que je lisais pour la première fois, campe son histoire en pleine culture américaine blanche et pauvre dans un comté rural de Virginie. Ces gens se définissent eux-mêmes de rednecks. Or, qui sont-ils? Pourquoi leur colle-t-on tous les défauts du monde? Pourquoi toute cette condescendance? Pourquoi cette culture de loosers?
L'histoire se passe principalement au début des années 2000. La plupart des personnages sont jeunes, de parents absents parce que souvent décédés. L'espérance de vie est peu élevée dans ces régions et on devient le plus souvent parent lorsqu'on est adolescent. Les enfants sont élevés par qui le peut: grand-parents, voisins, services sociaux. Damon est issu de tout ça, avec tout ce qui va avec ce contexte. Orphelin dès 11 ans, il vivra sa vie comme il peut en foyers d'accueil, fera une fugue, vivra une rédemption et arrivera ce qui arrive encore trop souvent: l'oxycontin, ses dérivés et ses conséquences.
Kinsolver raconte cette courte vie comme une épopée, à travers une gallerie de personnages hallucinants. Bien sur, il y a les éclopés, ainsi que les profiteurs, les scélérats, mais aussi, ici et là, des êtres d'une humanité forte et belle. Le résilient Damon naviguera de l'un à l'autre. Faux amis, professeurs bienveillants, coach de sport alcolo, et fille de voisins amis se succéderont au fil de ses lourdes peines et de sa découverte du monde, difficile comme ça s'peut pas.
Attention: vous serez bouleversé à la fin de ce livre où les couches de violence se superposent à celles de bienveillance. Les dialogues sont superbes, et les sentiments décrits sont d'une rare intensité, beaux, précis. Barbara Kingsolver est certainement une grande autrice. Vive ces Américains qui nous font découvrir ce pays incroyable d'un point de vue rendu trop rare, celui de l'intérieur, tant du peuple de ce pays que de son âme.
Superbe roman (disponible en français chez Albin Michel).
Barbara Kinsolver, que je lisais pour la première fois, campe son histoire en pleine culture américaine blanche et pauvre dans un comté rural de Virginie. Ces gens se définissent eux-mêmes de rednecks. Or, qui sont-ils? Pourquoi leur colle-t-on tous les défauts du monde? Pourquoi toute cette condescendance? Pourquoi cette culture de loosers?
L'histoire se passe principalement au début des années 2000. La plupart des personnages sont jeunes, de parents absents parce que souvent décédés. L'espérance de vie est peu élevée dans ces régions et on devient le plus souvent parent lorsqu'on est adolescent. Les enfants sont élevés par qui le peut: grand-parents, voisins, services sociaux. Damon est issu de tout ça, avec tout ce qui va avec ce contexte. Orphelin dès 11 ans, il vivra sa vie comme il peut en foyers d'accueil, fera une fugue, vivra une rédemption et arrivera ce qui arrive encore trop souvent: l'oxycontin, ses dérivés et ses conséquences.
Kinsolver raconte cette courte vie comme une épopée, à travers une gallerie de personnages hallucinants. Bien sur, il y a les éclopés, ainsi que les profiteurs, les scélérats, mais aussi, ici et là, des êtres d'une humanité forte et belle. Le résilient Damon naviguera de l'un à l'autre. Faux amis, professeurs bienveillants, coach de sport alcolo, et fille de voisins amis se succéderont au fil de ses lourdes peines et de sa découverte du monde, difficile comme ça s'peut pas.
Attention: vous serez bouleversé à la fin de ce livre où les couches de violence se superposent à celles de bienveillance. Les dialogues sont superbes, et les sentiments décrits sont d'une rare intensité, beaux, précis. Barbara Kingsolver est certainement une grande autrice. Vive ces Américains qui nous font découvrir ce pays incroyable d'un point de vue rendu trop rare, celui de l'intérieur, tant du peuple de ce pays que de son âme.
Superbe roman (disponible en français chez Albin Michel).
lundi 29 juillet 2024
Comme un long accident de char, par Joël Martel, éditions La Mèche
Il faut d'abord dire que le titre est superbe, et il l'est d'autant plus qu'il est tiré d'une superbe métaphore utilisée par l'auteur dans son livre. Ce qui est "Comme un long accident de char", Martel en parle joliment, et avec le regard du connaisseur, de celui qui sait de ce dont il parle. Ses histoires personnelles de rencontres avec la mort sont non seulement sympathiques, mais aussi pleines de respect pour les petitesses et les grandeurs des personnages qu'il décrit. J'aime bien lorsque l'auteur aime les gens. Ça se sent, même à travers la description de leurs défauts les plus sordides.
Martel écrit avec plein de couleurs. Ses portraits des gens de son entourage donnent à chacun des traits particuliers qui nous les rendent sympatiques, d'autant plus que l'environnement dans lequel tout ce beau monde gravite n'est pas nécessairement le plus beau. Pas le pire, mais, mais pas éclatant non plus. La vie, dans une petite ville comme Alma, dans le Lac St-Jean que je qualifierais de "non touristique", est beaucoup plus jolie lorsque c'est quelqu'un qui la connaît par coeur qui la décrit. Pour ça, Martel en est un excellent ambassadeur.
Les portraits de vies comme comme ceux d'un tel livre peuvent facilement tomber dans le misérabilisme ou la douce revenge,par exemple, ce qui peut gâter la sauce. C'est le contraire ici, comme d'ailleurs avec cet autre des éditions La Mèche, que j'ai eu le plaisir de lire juste avant. Bravo à cet éditeur qui sait trouver de bons raconteurs. Je viens d'en décourir deux de suite et je suis agréablement étonné.
Qu'on s'y reconnaisse ou pas, ce type de récit fait du bien et finit par nous toucher beaucoup. Faut dire que Martel garde les moments les plus forts pour la fin. N'empêche, on ne s'ennuit pas avec lui, même que j'en aurais bien pris quelques pages de plus.
Recommandé!
Martel écrit avec plein de couleurs. Ses portraits des gens de son entourage donnent à chacun des traits particuliers qui nous les rendent sympatiques, d'autant plus que l'environnement dans lequel tout ce beau monde gravite n'est pas nécessairement le plus beau. Pas le pire, mais, mais pas éclatant non plus. La vie, dans une petite ville comme Alma, dans le Lac St-Jean que je qualifierais de "non touristique", est beaucoup plus jolie lorsque c'est quelqu'un qui la connaît par coeur qui la décrit. Pour ça, Martel en est un excellent ambassadeur.
Les portraits de vies comme comme ceux d'un tel livre peuvent facilement tomber dans le misérabilisme ou la douce revenge,par exemple, ce qui peut gâter la sauce. C'est le contraire ici, comme d'ailleurs avec cet autre des éditions La Mèche, que j'ai eu le plaisir de lire juste avant. Bravo à cet éditeur qui sait trouver de bons raconteurs. Je viens d'en décourir deux de suite et je suis agréablement étonné.
Qu'on s'y reconnaisse ou pas, ce type de récit fait du bien et finit par nous toucher beaucoup. Faut dire que Martel garde les moments les plus forts pour la fin. N'empêche, on ne s'ennuit pas avec lui, même que j'en aurais bien pris quelques pages de plus.
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